Ne pas poursuivre les pensées, ne pas fuir les pensées, seulement ne pas s’en préoccuper : c’est ce que nous faisons en zazen. Dire que le zen est contre la pensée, c’est aller un peu vite. Le bouddhisme se préoccupe de la juste utilisation de notre esprit, l’esprit décliné sous toutes ses formes : la conscience, la réflexion, la considération, la pensée. Certaines écoles du bouddhisme se définissent comme des écoles de la pensée, d’autres comme des écoles de la conscience. Dans le zen, deux aspects de la pensée sont considérés. Le premier, c’est : comment penser ? Le deuxième : dans quelle intention nous pensons ?

Comment penser ? Agiter des pensées prises çà et là ne fait pas de nous un penseur. Penser a pour fondement la réalité, une prise de conscience de la réalité. Penser à partir des pensées des uns et des autres, agiter des pensées, c’est sans intérêt. Une pensée qui n’est pas précédée d’une prise de conscience de la réalité n’a pas de valeur. C’est comme un médecin qui donnerait des médicaments sans avoir fait le diagnostic de la maladie.

Dans le zazen – qui est racine de toute activité psychique – le premier point est de laver la conscience. C’est la chose la plus importante : laver la conscience de toutes souillures, de toutes limites. Ensuite, laisser la réalité se réfléchir sur la conscience. Ensuite, considérer certains aspects de cette réflexion. Ensuite, organiser ces éléments de réflexion et avec cela, pensare : peser, sous-peser. Qu’est ce qui est bien ? Qu’est-ce qui est mal ?

Donc, une pensée sans fondement est sans intérêt ; bien plus, elle nous plonge dans la confusion.

Penser du fond de la non-pensée. Le grand philosophe Alain dit : « Dans l’art de la pensée, la non-pensée est une part, et non la moindre. » Prendre conscience de la réalité, avec une conscience lavée de tout point de vue : c’est le fondement d’une pensée juste.

Le deuxième point que le zen nous demande de considérer, c’est : quelle est l’intention derrière cette pensée ? Pourquoi voulez-vous partager à tout prix vos pensées avec les autres ? C’est le plus souvent pour être reconnu ; parfois même pour montrer qu’on est supérieur aux autres ; parfois même pour les diriger ; parfois même pour détruire, pour faire la guerre. Dans le bouddhisme, une pensée utile est une pensée bénéfique, pour le bien de toutes les existences, une pensée qui aide à y voir clair.

Quand notre façon de penser est juste, quand notre intention est bonne, nous devons exprimer cette pensée au bon moment, au bon endroit, de la bonne façon, en tenant compte de la personne à qui nous voulons la présenter.

Dans la pratique de la pensée, la sagesse est importante. La façon de penser est nécessaire, mais pas suffisante. L’intention est nécessaire, mais pas encore suffisante. L’éveil à la situation est important. Ces trois aspects, c’est ce qu’enseigne la voie du Bouddha.


Taiun JP Faure, août 2023

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